Mardi 3 septembre 2019, le Gouvernement a officiellement lancé le Grenelle contre les violences conjugales qui se clôturera le 25 novembre 2019 (journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes). La date du 3 septembre 2019 fait écho au numéro d’écoute national 3919 mis en place pour les victimes : anonyme et gratuit, ce numéro est encore trop méconnu alors qu’il peut sauver des vies. Le mettre en lumière était donc l’un des objectifs naturels de la journée de lancement du Grenelle.
En outre, ce même jour, on dénombrait déjà 100 féminicides depuis le 1er janvier 2019 – soit une femme tuée tous les deux jours. La question des violences conjugales est urgente et prégnante. Si ces crimes concernent également les hommes, les femmes restent de loin les plus touchées. Ainsi, en 2017, parmi les individus tués par leur partenaire ou ex-partenaire intime, 130 étaient des femmes et 21 des hommes.
C’est dans ce contexte que s’inscrit la démarche du gouvernement. Parce que notre indignation collective face à ces drames appelle des actions fortes, nous devons, plus que jamais et au-delà de tout clivage politique, nous mobiliser tous ensemble. Nommé membre du groupe de travail parlementaire relatif aux violences conjugales, j’espère vous apporter, dans cet article, les éléments nécessaires sur ce dispositif, le cadre dans lequel il s’inscrit et les premières annonces du Gouvernement.
1/ Le Grenelle des violences faîtes aux femmes : une mobilisation nationale et locale
L’objectif de ce Grenelle est simple : trouver des solutions efficaces pour lutter contre les violences conjugales en réunissant les familles et proches des victimes, les associations, les administrations centrales et locales, les ministres et parlementaires, les médias, les professionnels de la santé, les forces de l’ordre, les magistrats et avocats et tout autre acteur concerné. Les travaux s’articuleront autour de trois axes : 1) prévenir les violences ; 2) protéger des violences, et 3) punir les violences.
Le dispositif prendra évidemment une dimension territoriale : cent Grenelles locaux seront organisés par l’Etat partout en France. Ainsi, les comités locaux d’aide aux victimes sont actuellement également réunis par les préfets, en lien avec les procureurs, afin de travailler ensemble sur le recueil de plaintes des victimes dans les hôpitaux, les mesures de renforcement pur mieux repérer et protéger les victimes de l’auteur de violences, l’hébergement d’urgence, etc.
A l’échelle parlementaire, les membres du groupe de travail dont je fais partie organiserons, dans différentes régions, des évènements publics afin de trouver ensemble des solutions efficaces. Tous les citoyens le souhaitant seront invités, l’objectif étant de recueillir les idées et témoignages de tous afin de bâtir un plan d’action efficace. Un recueil de solutions et de bonnes pratiques issues du terrain sera produit à la fin du Grenelle et remis à la Secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes.
Enfin, le Gouvernement a mis en place une adresse mail spécifique (grenelle@pm.gouv.fr) pour que chaque citoyen puisse contribuer à cette mobilisation majeure, y compris lorsqu’il n’est pas en capacité de se rendre à l’un des évènements proposés.
2/ Les dispositifs préexistants au Grenelle et les mesures d’urgence déjà annoncées
Depuis plus de deux ans, le Gouvernement a mis en place une série de mesures pour la lutte contre les violences faîtes aux femmes – qui a été reconnue grande cause nationale du quinquennat. Le Grenelle lancée ce 3 septembre vise précisément à renforcer ces mécanismes et à s’en inspirer pour dégager des solutions encore plus novatrices et efficaces. A titre d’exemple, parmi les dispositifs déjà lancés, on peut mentionner :
- La création, en octobre 2018, d’une plateforme de signalement en ligne disponible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 (depuis, on dénombre 3 825 tchats dont 1 237 signalements) et l’allocation de 120 000 euros supplémentaires pour le numéro d’écoute national 3919 avec un objectif de 100 % d’appels répondus.
- La demande, en mai 2019, d’un plus grand recours à l’ordonnance de protection par le juge aux affaires familiales – visée par l’article 515-9 du code civil, ce type d’ordonnance peut être délivré en urgence pour protéger les femmes victimes de violences avant ou après un dépôt de plainte, que l’agresseur ait été condamné ou pas.
- La mise en œuvre de mesures pour mieux prévenir les violences comme l’engagement de contrats locaux contre les violences pour partager les alertes et intervenir avant qu’il ne soit trop tard ou l’expérimentation du bracelet électronique pour maintenir les hommes violents éloignés.
- La loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexistes et sexuelles : cette loi vient compléter l’arsenal législatif, notamment par des dispositions allongeant les peines pour les violences commises en présence de mineurs.
- L’inauguration à Tours d’un centre d’accueil et de prise en charge des femmes victimes de violence, ouvert 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. D’autres initiatives sont actuellement en cours de préparation sur ce modèle.
Enfin, lors du lancement du Grenelle ce mardi, le Premier ministre a déjà annoncé les mesures d’urgence suivantes pour venir en aide aux femmes subissant des violences conjugales :
- La création de 1 000 nouvelles places d’hébergement et de logement temporaire à partir du 1er janvier 2020 (cinq millions d’euros seront débloqués à cet effet) ;
- La possibilité de porter plainte à l’hôpital généralisée à partir du 25 novembre 2019 afin de fluidifier les conditions du dépôt de plainte ;
- Faciliter les conditions d’accès des femmes victimes de violence au dispositif de garantie « Visale » pour qu’elles puissent bénéficier d’une caution locative gratuite et retrouver un logement plus simplement ;
- Le lancement d’une plateforme de géolocalisation pour mieux identifier les places d’hébergement réservé disponibles à proximité afin que les victimes puissent être mises à l’abri plus rapidement ;
- La mise en œuvre du dispositif électronique anti-rapprochement dans les 48 heures suivant le prononcé de la mesure : un bracelet électronique sera posé sur l’auteur des violents tandis que la victime sera dotée d’un récepteur. En cas de rapprochement, les forces de l’ordre seront alertés pour intervenir vite ;
- Le lancement d’audits dans 400 commissariats et gendarmeries visant à examiner et améliorer la façon dont les femmes sont accueillies ;
- La mise en place d’une grille d’évaluation du danger dans tous les services de police et de gendarmerie pour éviter les mains courantes, aider les forces de l’ordre à mieux identifier les femmes victimes de violences et encourager au dépôt de plainte ;
- La généralisation de la possibilité de porter plainte à l’hôpital à partir du 25 novembre.
- La mise en place d’un « retour d’expérience » au niveau local suite à un féminicide : cela vise à permettre de tirer les leçons de ce qui n’a pas fonctionné et d’améliorer les mécanismes déjà en place. La méthode sera précisée par l’inspection déjà lancée sur les homicides conjugaux ;
- La possibilité pour le juge pénal de suspendre ou d’aménager l’exercice de l’autorité parentale du conjoint violent ; et
- La suspension de plein droit de l’autorité parentale en cas de féminicide dès la phase d’enquête ou d’instruction.
Grande cause nationale du quinquennat, la lutte contre les violences conjugales appelle des actions concrètes et une mobilisation à tous les niveaux. Nous sommes tous concernés par ce combat pour les femmes mais aussi pour aussi l’avenir de notre société.